Le temps d'un passage

Lundi 16 juillet 2007

Carmin profond

(Une petite dernière avant les airs... Un mois en France avant de retrouver les marchands de dvd... Bonnes vacances à tous!)

Carmin profond d'Arturo Ripstein est un petit bijou tout noir, de ce noir du sang séché des plaies définitives, un terrible et profond carmin… Coral est laide, difforme d’obésité, pas très intelligente, seule très seule malgré ses deux enfants. Infirmière embaumeuse, elle fait les petites annonces du cÅ“ur en rêvant à Charles Boyer – nous sommes en 49. C’est Nico qui se présente, séducteur de troisième zone spécialisé dans le dépouillage de veuves et autres âmes naïves et… seules. Il est affligé d’une ridicule calvitie vécue comme un inadmissible trauma qu’une moumoute compense jusqu’au moment où elle tombe ou s’envole par la fenêtre… Le couple fatal se constitue définitivement lorsque Coral découvre que Nico a tué sa femme. Plutôt que de fuir ou de le dénoncer, elle abandonne ses enfants et le force à la prendre comme complice, femme, amante, sÅ“ur, moitié du diable, etc. C’est donc désormais ensemble qu’ils se présentent, en tant que frère et sÅ“ur, aux rendez-vous fixés par les malheureuses prétendantes à la fin de… la solitude. Toutes y laisseront leur vie, l’une après l’autre. Cette histoire de souffrance(s), de complexes, de blessures narcissiques et –donc !- de solitudes, est un fait divers réel qu’Arturo Ripstein (ancien assistant de Bunuel) met en scène avec presque autant de détachement que ses personnages éliminent leurs proies… Il écarte les lois du genre qui magnifient l’horreur à grand renfort de romantisme, de nihilisme, de psychologisme, et se contente de filmer la médiocrité, le sordide dans son aspect le plus effroyablement banal, juste une dérive sanglante de la souffrance, sans préméditation ni autre violence que celle nécessaire à la perpétuation du projet initial inconscient : en finir avec cette vie de tordu(e)(s), en finir avec la vie tout court. Le film a une dizaine d’années maintenant mais porte en lui assez d’universalité pour être intemporel. Les femmes qui interprètent les victimes de cette folie humaine, trop humaine, rivalisent de talent face à l’incroyable Regina Orozco, monstre total et absolu si dangereusement dissimulé derrière le pathétique… A voir.



16/07/2007
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